Luc Baranger, © Mithieux
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Luc Baranger

Biographie par Michel Embareck, écrivain reporter :

Les rails du vrai ne figurent à aucun programme de sociologie universitaire. Car il s’agit d’une dialectique floue à géométrie variable prêtant autant à rire qu’à pleurer, n’épousant aucune autre conviction que celle de l’instant. Les rails du vrai ont été forgés par Karl Marx, Robert Johnson, Louis-Ferdinand Céline, Willem Reich, le Président Rosko, Philippe Garnier, Lightnin’ Hopkins et Stevie Ray Vaughan, les billets d’avion en stand-by, Jack London et une fille de bonne composition qui a su attendre qu’on la cherche au travers des autres.
Les rails du vrai vous emmènent parfois très loin, histoire de voir si vos rêves tiennent le coup au contact de la réalité. Des rêves, Baranger a eu le temps d’en astiquer, à Trélazé, Maine & Loire, capitale de l’ardoise, et d’une enfance aussi grise que la mine locale éclairée au Gévélor 12°. La suite ? Normale pour un môme qui a trop écouté Radio Caroline, celle qui émettait du rock non stop à partir d’un cargo rouillé ancré en mer du Nord. Ce fut le départ vers l’Angleterre du British blues, jusqu’à ce que lui tombe un beat inconnu entre les oreilles : celui de J.J. Cale, l’homme qui a su mettre la flemme en musique et installer son rockin’ chair derrière la vitre d’un monde qu’il regarde partir en guenilles.
Baranger a traîné ses boots derrière Cale et épousé le grand rêve doré, celui qui, de cours du soir en do-it-yourself, donne sa chance aux damnés de la terre. Mille métiers mille misères : loueur de bicyclettes, roadie, lustreur de parquets, peseur de poids lourds dans une carrière, éducateur chez les toxicos, chauffeur de taxi, traducteur d’une multitude de romans américains, installateur de système d’enseignement à distance, exploitant de submersible, conseiller ministériel de république bananière, etc. Il a compris par où passaient les rails du vrai. Ceux du blues, du rock, du décor Potemkine d’un continent en château de cartes de crédit, de l’âme humaine engraissée au billet vert. Je l’ai vu à l’oeuvre dans l’océan Indien, en gestionnaire des prestations sociales sur l’île de La Réunion. Payer des gens à rien foutre, sauf à danser le maloya, boire du rhum au goulot et reluquer la voisine lui allait bien. Mais c’était du travail, des horaires et s’essuyer les mains grasses du cambouis du chopper avant de saluer m’sieur le préfet. Alors, Baranger, qui a composé du rock’n’roll pour Paul Personne le casanier, du blues pour Nico Wayne Toussaint, a adopté les mers du Sud, les yeux de Marie, les confidences de son chien, le sillage du ministre de l’Éducation du coin, les cyclones et le lagon sous sa varangue. Un jour prochain il élèvera des condors au Paraguay ou apprendra le macramé aux Inuits. Parce que les rails du vrai passeront par là. Et il continuera à écrire le monde tel qu’il l’a rêvé avant de le voir.

  • Luc Baranger, L'Extravagant Monsieur Parker
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