Michel Ucciani, Natio
RécitDocument
336 pages
a paru le 5 mars 2020
ISBN 978-2-3588-7620-9
Michel Ucciani

Natio

Du FLNC au grand banditisme
RécitDocument
336 pages a paru le 5 mars 2020 ISBN 978-2-3588-7620-9
RécitDocument
336 pages a paru le 5 mars 2020 ISBN 978-2-3588-7620-9

Pour la première fois, un ancien « Natio », membre d’un des commandos les plus actifs du FLNC de la fin des années 1970 à la fin des années 1990 revient sur son histoire. Jeune militant engagé dans la lutte nationaliste après les évènements d’Aléria en 1976 et la naissance du FLNC, Michel Ucciani va peu à peu glisser vers la délinquance. Les attentats et l’action clandestine lui donnent le goût de l’action, le recours à « l’impôt révolutionnaire » et autres rackets en font un gangster et un braqueur de haut vol.
Pour la premiere fois racontée de l’intérieur, cette évolution de la lutte politique et des idéaux de la jeunesse au grand banditisme nous fait comprendre les dérives du nationalisme corse.

  • Né en 1960, Michel Ucciani s’installe en Corse en 1976. Après une dizaine d’années de militantisme actif au sein du FLNC, il alterne braquages, cavales, et détentions : 25 ans de prison. Il écrit son récit lors d’ateliers d’écriture en maisons d’arrêt et centrales pénitentiaires.
    • Michel Ucciani, Corse en prison
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    J’ai lu tellement de livres de gangsters et de romans policiers qu’un jour je me suis dit : pourquoi ne pas en écrire un moi-même ? Je n’aurais rien à inventer : ma vie a été un polar. Depuis mes 19 ans, je joue aux gendarmes et aux voleurs. Cette vie, il suffirait que je la raconte.

    Mener cette existence est loin d’avoir été une réussite totale : à 60 ans, je totalise presque 25 ans de prison. Mon casier judiciaire affiche dix condamnations, soixante-douze années de prison ferme prononcées à mon encontre, et j’y suis encore à ce jour. C’est déjà beaucoup. La part de réussite, c’est que je n’ai pas payé tout ce que j’ai pu faire dans ma vie, heureusement, sinon ce serait en milliers que se compteraient les années de prison.

    J’aurais pu mourir cent fois, criblé de balles, tué par la police sur un braquage ou sur une arrestation, tué par des ennemis pour une vengeance ou une rivalité, dans un règlement de comptes, ou bien encore dans une explosion en faisant une fausse manœuvre à l’époque où on jouait toutes les nuits avec de la dynamite. Je suis passé à travers tout ça en franchissant toutes les barrières entre le militantisme nationaliste et le grand banditisme.

    Je suis toujours vivant, chance ou miracle, qui peut le savoir ! Quoi qu’il en soit, je ne regrette rien, mener cette vie m’aura plu du premier au dernier jour.

    Je vais maintenant employer les quelques années d’inactivité forcées qu’on m’impose avec cette dernière incarcération pour m’atteler à écrire ce livre, et raconter mon parcours. Parcours qui n’est en aucun cas un exemple à suivre.

    Une jeunesse insouciante

    Rien ne me prédestinait à mener une vie de marginal, étant issu d’une famille travailleuse et honnête. Mon enfance a été des plus heureuses et des plus tranquilles. À la maison, on n’a jamais manqué de rien, ni jamais eu faim. Donc vraiment, aucun besoin de voler pour manger. Si je me suis mis au vol plus tard ce n’est pas par besoin mais par envie, l’envie de braver les interdits.

    Je me souviens avoir commis mon premier larcin vers à 7 ans, le premier vol de toute ma vie, et m’être fait prendre. Avec un copain, on avait été au supermarché et on avait ouvert toutes les boîtes de fromage pour y voler à l’intérieur les images des joueurs de football. Le vigile avait vu notre petit manège et il nous avait chopés. On s’était pris un bon coup de pied au cul et il nous avait expulsés du magasin. Ce n’était pas un bien gros vol. Par la suite, tout au long de mon enfance, j’ai souvent fauché des bricoles dans des magasins.

    Je suis né à Aubervilliers, le 16 mai 1960, dans le 93. Bien avant ma naissance, mon grand-père, ma grand-mère et mon père avaient quitté la Corse et le sud de la France pour gagner leur vie en région parisienne. Mon père a rencontré ma mère dans la rue même où ils habitaient tous les deux, à Drancy. La mère de ma mère, ma deuxième grand-mère, exploitait un bar-épicerie au bout de cette rue. J’ai grandi dans cette rue, au numéro 52, entre mes grands-parents, mes parents, ma sœur née dix-huit mois après moi, ma marraine et sa famille. J’y ai vécu jusqu’à mes 6 ou 7 ans puis on a déménagé pour aller vivre dans un petit village du Val d’Oise, Le Thillay, où mon grand-père avait construit une belle villa avec deux appartements.

    J’ai eu une bonne scolarité à l’école primaire du village, j’étais même très bon élève. Tous les ans, en fin d’année, j’avais droit au prix d’honneur ou au prix d’excellence de l’école. Ce genre de cérémonies se faisait beaucoup à cette époque-là. Il faut dire que nous avions d’excellents maîtres d’école. Ça a laissé des traces puisque, aujourd’hui encore, je me débrouille sans trop de fautes de français. Je me souviens encore de Mme Camus, ma maîtresse du CM2, une femme d’une gentillesse absolue qui nous organisait des classes de neige. Même des années après avoir quitté sa classe, quand je passais dans le quartier, je m’arrêtais la saluer pour discuter avec elle.

    Ça s’est dégradé par la suite au secondaire. Le collège, ce n’était pas du tout mon truc. Je n’aimais ni l’anglais, ni les maths modernes, je n’y ai jamais rien compris. En plus, le collège a failli être détruit un jour. Un dimanche, lors du salon aéronautique du Bourget, je regardais depuis le balcon un avion faire une démonstration juste en face de moi, au-dessus des champs, avec en arrière-plan, mon collège et Goussainville, l’avion a explosé en plein vol et il est tombé, je l’ai vu se disloquer en l’air et tomber en boule de feu au sol. Ça a fait comme un champignon nucléaire, impressionnant, c’était un avion russe, un Tupolev 144, une copie du Concorde. Son aile était appuyée sur le mur du collège, je me souviens être allé tout de suite sur le lieu du crash, il y avait du kérosène qui coulait à flots depuis le haut d’une pente, là où était tombé le plus gros de l’épave. J’avais même récupéré quelques pièces d’avion en souvenir, il y en avait partout, dispersées dans les champs. Il y a eu quatorze morts ce jour-là, c’était le 3 juin 1973.

    Je passais plus de temps à jouer au ping-pong dans la salle de permanence qu’en classe. Le temps s’égrenait à vadrouiller en vélo avec les copains et à cavaler dans les grands champs qui nous entouraient. Et l’été, on allait faucher les cerises dans des propriétés du coin. Il y en avait une qui nous attirait plus particulièrement, on aurait dit un château à l’abandon, construit au fond d’un immense parc, pas très loin de mon école. On a bien dû y faire une cinquantaine de visites.

    J’ai fini par me retrouver à 14 ans au lycée technique d’Aubervilliers à faire de la mécanique auto car j’aimais bricoler les moteurs. Mon grand-père m’y déposait tous les matins les deux premières années, pour la troisième année ça n’a plus été la peine, j’avais ma moto. Mais je crois que je n’ai pas eu de bol, je suis tombé sur le pire ramassis de cancres qui puisse exister dans un lycée et sur les professeurs les plus désabusés du monde, ils étaient tous au bord de la dépression et ne nous ont rien appris en trois ans.

    Je compensais par la lecture, je lisais énormément. Tous les samedis matins, pendant des années, j’allais au marché sur le stand d’un bouquiniste. Je remplissais un sac d’une cinquantaine de livres et ils me faisaient la semaine. J’ai commencé par les bandes dessinées puis je suis passé aux romans. La lecture m’a sûrement donné le goût de l’aventure.

    À la maison, il y avait mes parents, ma sœur et mes grands-parents paternels. Vers mes 12 ans, mes parents ont divorcé, et au lieu de suivre l’un ou l’autre, j’ai choisi de rester vivre avec mes grands-parents. Ma sœur est restée avec ma mère et mon père est parti avec une nouvelle femme, et on n’a plus vraiment eu de rapports, lui et moi. Avec le recul, je sais maintenant que mon choix a fait de la peine à ma mère qui aurait aimé me garder auprès d’elle, mais elle a accepté ma décision.

    Mon autre grand-mère, la mère de ma mère, n’habitait pas très loin, à Goussainville, distante de 5 ou 6 km du Thillay. Elle vivait avec le frère de ma mère, Jacques, qui était aussi mon parrain, sa femme Lydie, et mes deux cousines germaines, Michelle et Danielle avec qui j’ai passé une partie de mon enfance. Souvent, ma sœur et moi y allions les jeudis, notre grand-mère nous emmenait tous les quatre promener et pique-niquer au bois de Goussainville ou alors nous jouions toute la journée, ma sœur, mes cousines et moi, dans la grande pièce du sous-sol.

    On partait même tous ensemble pour les grandes vacances d’été en Haute-Savoie, cette grand-mère-là étant originaire des montagnes et d’un petit village appelé St-Paul-en-Chablais. On y allait même faire du ski l’hiver, mais ça c’était de 12 à 14 ans.

    Sans être riches, nous étions aisés, mon grand-père était entrepreneur en maçonnerie, plomberie, chauffage. Et à l’époque, le travail ne manquait pas. Mon grand-père faisait aussi parfois dans la démolition de vieux immeubles. J’adorais l’accompagner sur les chantiers. Je farfouillais partout, je récupérais du plomb, du cuivre que je stockais et que j’allais revendre au ferrailleur. Je me suis payé ma première moto 125 avec la récupération de métaux sur ses chantiers.

    J’ai passé mon enfance dans son hangar et son atelier à bricoler des vélos et des mobylettes. Le siège de son entreprise était resté à Drancy. Nous vivions dans une maison assez rustique, en bois, que mon grand-père avait construite pour mes parents lorsqu’ils se sont mariés, et où j’ai passé les sept premières années de ma vie. L’entrepôt de mon grand-père et le terrain qui l’entourait étaient mes terrains de jeux.

    En bon Corse qui se respecte, mon grand-père aimait les armes, il en a toujours eu quelques-unes, un vieil automatique calibre 7,65, des carabines et des fusils. Il gardait son calibre enfermé dans un coffre-fort, mais j’avais vite découvert la combinaison, il m’est arrivé quelques fois de prendre son pistolet pour aller au lycée technique, quand j’avais 15 ans. J’avais déjà le goût immodéré de porter une arme à la ceinture, goût qui n’allait plus me quitter. Il n’ouvrait jamais ce vieux coffre-fort pour vérifier. Alors j’étais tranquille pendant cet emprunt.

    Il m’emmenait de temps en temps tirer dans la propriété d’une de ses amies. Avec le recul, je pense que c’était l’une de ses maîtresses car quand on arrivait dans cette propriété, il me donnait le calibre et la carabine, et me laissait faire mes cartons de tir seul. Tandis que lui et elle filaient s’enfermer dans la maison. Il était assez cavaleur, j’ai sûrement hérité de ce trait de personnalité.

    Le hasard a fait qu’un jour, à cette époque, mon grand-père a été lui même pris en otage dans sa banque, pendant une demi-heure, par des braqueurs, lors d’un hold-up. Qu’est ce que j’ai ragé de ne pas être avec lui ce jour-là, juste pour voir comment ils faisaient en vrai !

    J’étais passionné de motos. Quand j’ai eu la 125, je suis même allé tourner un vendredi soir à Rungis sur le circuit clandestin improvisé autour des halles, le grand marché international. Là, se regroupaient tous les vendredis soirs les motards de la région parisienne en mal de sensations, et c’est là où il y a eu tant d’accidents mortels, avant qu’ils ouvrent le circuit Carole, du nom d’une des décédées de ces courses sauvages du vendredi soir à Rungis.

    J’étais inséparable d’un ami d’enfance, Jérôme, avec qui je passais les journées à rouler en mobylette. On se suivait tous les deux depuis l’école primaire. On a tout fait ensemble. Les premières boums, les premiers cinémas, les premières sorties, les premières conneries, jusqu’à ce que je déménage en Corse. Je me souviens qu’à cette époque-là, j’étais très timide avec les filles, autant mon pote Jérôme était dégourdi avec elles, autant moi j’étais un peu coincé, ça a bien changé depuis. À l’époque, je tombais toujours amoureux de ses petites copines à lui, mais elles étaient déjà prises.

    J’avais pratiqué pendant quelques années l’athlétisme dans le club du Thillay, puis le football. Mais sans grande conviction.

    J’ai tout eu, vélo, mobylette à 14 ans, la moto 125 à 16 ans. J’allais en vacances en Corse dans la famille depuis mes 8 ou 9 ans. J’étais gâté par mes grands-parents et par ma marraine qui ne me refusait pas grand-chose. Elle me disait toujours oui.

    Mon pote Jérôme se faisait embaucher dans les fermes avoisinantes pour ramasser les patates ou les betteraves, quand c’était les vacances scolaires ou pour les week-ends, histoire de se faire de l’argent de poche. J’ai essayé un jour avec lui dans une ferme, j’ai tenu une journée. Déjà tout jeune, je n’aimais pas le travail, surtout de force comme ça dans les champs.

    J’ai, bien sûr, toujours adoré la Corse, le pays de mes ancêtres. J’essayais d’y aller le plus souvent possible. Je passais mon temps avec mes cousins et cousines dans la famille de mon grand-père à la plaine de Cuttoli, à 20 km d’Ajaccio, et les étés à la rivière. On n’allait pratiquement jamais à la plage, on s’amusait bien plus dans les cours d’eau avec leurs rochers d’où l’on pouvait plonger. La plupart du temps, je ne voulais plus repartir de Corse. J’étais souvent avec le mari de ma cousine Victoire, Pascal, qui faisait du parachutisme et beaucoup de sport, je le suivais sur la zone de saut avec le para-club de Bastia, et je l’accompagnais à la salle de sport. Il m’a donné mes premières leçons de boxe et de musculation. C’est sans doute lui qui m’a donné le goût du sport.

    Parfois, lui et moi, on montait en courant jusqu’au sommet de la montagne qui surplombait nos maisons à la plaine de Cuttoli. Ça demandait un sacré effort. La montée durait environ une heure, avec le cœur au bord de l’explosion.

    Un jour, il m’a entraîné dans une de ses escapades en vélo, on a fait la montée du col de Vizzavona depuis Ajaccio, cent bornes aller-retour, trop dur, j’ai calé à la fontaine de Bocognano, 6 km avant le sommet du col. Enfin, c’était une très belle période pour moi. C’était vraiment une jeunesse heureuse. À la fin de ces séjours, je ne voulais plus rentrer sur Paris.

    Jusqu’à mes 16 ans, je n’étais pas vraiment porté sur la délinquance, je n’avais rien fait, hormis quelques petits chapardages de gosse.

    À cette époque-là, mon père est revenu vivre dans la maison de mes grands-parents au Thillay, avec sa nouvelle femme et les enfants de celle-ci, le courant n’est pas passé entre eux et moi. C’est à ce moment que ça s’est vraiment dégradé entre mon père et moi car un soir, j’ai mis une rouste monumentale au fils aîné de ma belle-mère, devant son collège où j’étais allé l’attendre. On est con à cet âge là, car je n’avais aucune raison valable de faire ça. J’avoue, j’y avais été un peu fort, il était parti en ambulance. Le soir même, grosse embrouille avec mon père qui est venu me choper chez mes grands-parents. Ce qui m’a fait plaisir, c’est que mes grands-parents ont pris mon parti contre lui. De ce jour-là, on ne s’est pratiquement jamais plus parlé, lui et moi.

    En 1974, ma mère s’était remise avec un homme, Jo, qui avait deux petites filles avec lesquelles je m’entendais bien, on est partis quelques fois en vacances ensemble en Espagne quand je devais avoir 14 ans. Je n’en ai que des bons souvenirs. Je passais également les réveillons de fin d’année avec eux. Ma mère d’ailleurs est toujours avec Jo à ce jour.

    L’été de mes 16 ans, ma mère m’avait fait embaucher dans l’usine de peinture où elle est restée toute sa carrière, d’abord secrétaire, puis secrétaire de direction, jusqu’à sa retraite. Je voulais me faire un peu de sous avec un job d’été. Préparateur de commandes, je passais dans les allées avec mon transpalette et mon bon de commande et je déposais les différents pots de peintures sur la palette avant de les apporter sur le quai de chargement des camions qui les livraient. Déjà, je voyais bien que le travail, ça n’allait pas être ma tasse de thé. J’ai fait ça deux mois.

    CORSICA… ME VOILÀ !

    Un jour, mon grand-père a décidé de prendre sa retraite, de quitter le Val d’Oise et de partir en Corse, pour ma plus grande satisfaction. J’attendais ça depuis des années. Je suis donc rentré en Corse définitivement à 16 ans.

    Depuis tout jeune, moi, ce qui me branchait, c’était le monde des gangsters, des voyous, du milieu corse et des braqueurs de banques. J’étais à l’écart de tout ça, bien sûr, mais je lisais tous les bouquins là-dessus, je regardais les reportages, les faits divers, les films au cinéma. J’étais fan. Inconsciemment, je savais que ce monde-là était fait pour moi. Ça m’attirait trop.

    Je n’étais pas encore suffisamment informé sur la lutte nationaliste en Corse pour y être impliqué. Je suivais les infos qui relataient les attentats depuis la création du FLNC le 5 mai 1976, et même ce qui s’était passé avant avec les événements d’Aléria[1]. Mais sans plus, mes copains de la plaine de Cuttoli n’étaient pas du tout dans le nationalisme. Ils avaient pour idoles des joueurs de football, des chanteurs ou des acteurs. Moi, mes idoles, c’était Mesrine, Bonnie and Clyde, le gang des tractions avant et autres du même style. Vers mes 17 ans, quand j’ai lu le livre de Jacques Mesrine, L’Instinct de mort, je me suis dit que je voulais faire comme lui, des braquages. Maintenant, avec le recul et l’expérience, je sais qu’il n’était pas vraiment au point pour les braquages de banque puisque, bien souvent, ses actions se soldaient par des fusillades avec la police. Ses braquos étaient souvent des caisses et des coffres en « rentre-et-sort », vite fait. De l’improvisé, ça partait souvent en course-poursuite après les coups de feu. Choses que nous avons essayé d’éviter, mes amis et moi. Le but final, c’était que tout se passe bien sans accrochage inutile et qu’on reparte avec le maximum d’argent. On n’y allait pas pour jouer aux cow-boys dans les rues. Pour éviter ça, il fallait quand même un minimum de préparation des affaires.

    Je n’ai jamais compris pourquoi avec les capacités certaines que Mesrine avait, il n’a jamais réalisé de belles opérations de braquage comme des camions blindés ou des centres-forts. Dans son parcours, il a juste réussi un kidnapping comme grosse affaire. Par contre, il avait l’instinct pour sentir les flics et du cran, il n’hésitait pas à défourailler et à tirer lorsqu’ils arrivaient. Pas le genre à lever les mains et à se rendre au moindre képi qui se pointe. Ce n’est pas donné à tout le monde. Il n’a pas non plus hésité à attaquer une prison en mode kamikaze pour faire évader ses amis, ça on ne peut pas lui enlever.

    J’ai été encore plus attiré par le monde des gangsters lorsque j’ai vu plus tard Scarface au cinéma. Ce film, il a donné envie de faire le gangster à plusieurs générations de jeunes, moi y compris. L’argent facile, les armes, les affaires, les belles nanas… la vie de rêve qu’on aimerait tous, quoi.

    Sauf qu’avec l’expérience, je sais maintenant que ce film montre exactement tout ce qu’il ne faut pas faire si on veut durer dans le monde du crime.

    Mais bon, je n’y étais pas encore, le déclic allait pourtant venir assez vite. Déjà, je me retrouvais en Corse et c’était bien.

    Vers mes 18 ans, je ne bougeais pas trop de la plaine de Cuttoli, petit village où mon grand-père avait construit une maison juste à côté de ses deux sœurs. Je passais souvent mes soirées chez mes voisins, un couple très sympa, chez qui j’étais toujours le bienvenu, ils avaient trois filles, Carole, Laurence et Sylvie et ils en gardaient trois autres, confiées par les services sociaux. J’étais amoureux d’une des filles, Marie-Antoinette, une très jolie brune, on a fini par sortir ensemble mais ça n’a pas duré très longtemps. On allait souvent à la plage quand j’ai eu la voiture, puis je les ai emmenées en boîte le samedi soir quand on a tous eu l’âge pour ça. Je m’en souviens comme si c’était hier, sans doute parce que c’était vraiment des bons moments. C’était le temps de l’insouciance, des copains, des balades à moto, des baignades à la rivière, des soirées à déconner, à rigoler sur la petite place du village, des copines, et des nuits à vadrouiller. D’abord à moto, puis en voiture, dès que j’ai eu le permis. Je m’étais acheté ma première voiture, une Renault 12 que je passais mon temps à customiser, comme tous les jeunes de mon âge avec leur première voiture. Je l’avais transformée en Renault 12 Gordini, blanche avec des bandes noires. Je passais mes journées et mes soirées avec deux ou trois copains de la plaine de Cuttoli, Francois, Charles et d’autres.

    Nos soirées, on les passait sur la place du village. Après, vers minuit, on partait en virée, on allait voler l’essence aux touristes pendant la nuit pour pouvoir se promener la journée. Voler les pneus vu que j’usais très vite les miens. Je n’ai jamais fait rien de plus grave que ces petites conneries avec eux.

    Sauf peut-être une fois, une nuit où les gendarmes nous poursuivaient, sur la route du village, nous, en moto et eux, en Renault 4L. On avait pris un peu d’avance sur eux, dans un virage, on a fait basculer au milieu de la route une vieille carcasse de voiture qui était depuis des années posée sur un talus surplombant la route. Ils se sont encastrés dedans, heureusement, ils ne nous ont pas identifiés. Bref, des bêtises de jeunes, vraiment rien de plus. On était vraiment loin de la grande délinquance.

    Je n’ai pas gravi les échelons du banditisme comme certains qui commencent au bas de l’échelle, par voler des postes de radio, des motos ou des voitures, puis qui passent aux cambriolages, aux vols, au proxénétisme pour en arriver aux braquages. Moi, hormis deux ou trois motos 50 cm3 dérobées à Ajaccio la nuit pour faire du cross avec, je n’ai jamais volé grand-chose. Rien de tout ça chez moi, je suis passé directement de presque rien aux braquages à mains armées.

    Vu que la mécanique me plaisait bien, et que mon grand-père me tannait pour que je travaille, j’avais pris un petit boulot d’aide-mécano chez Renault puis chez Peugeot. Sans grande conviction, mais ça lui faisait plaisir de me voir bosser. Il n’imaginait pas du tout la voie que j’allais choisir plus tard.

    Mais à l’époque, un an et demi après mon installation en Corse, je me suis mis à m’intéresser vraiment à la Corse et à ce qui s’y passait. Tout naturellement, je me suis rapproché des copains qui avaient les mêmes idées que moi. Et qui avaient envie de se bouger pour la Corse. Le FLNC commençait à s’agiter avec de multiples actions et attentats. Comme j’aimais l’idée de l’action, cela me convenait. Il y avait eu déjà pas mal d’arrestations dans les rangs du FLNC et beaucoup de Corses emprisonnés et transférés à Paris devant la Cour de sûreté de l’État.

    Cette année 1978, la Corse avait vécu au rythme des matchs de l’équipe de Bastia qui avait réussi le plus extraordinaire des paris pour une si petite équipe, après des matchs de folie et des victoires contre plusieurs grands clubs européens, Bastia s’était qualifié pour la finale de la coupe d’Europe contre Eindhoven, un club hollandais.

    Les soirs de matchs, c’était île morte et après chaque match victorieux, la Corse entière retentissait des coups de revolver et de fusil. Un soir, je regardais un de ces matchs-là chez un cousin à Ajaccio, on hésitait à tirer au calibre depuis le balcon car, juste à l’étage au-dessus, habitait un policier, quand on a vu celui-ci sur son balcon se mettre à tirer avec un fusil d’assaut pour fêter la victoire du SCB, on n’a plus hésité une seconde et on a tiré plusieurs chargeurs. Je n’aurais raté la finale aller à Furiani pour rien au monde. Ce soir-là, on est montés à trois à Bastia, dans la voiture d’un ami, il pleuvait à torrents, ils auraient dû annuler le match tellement il pleuvait, les Bastiais n’ont jamais pu faire l’écart à domicile et sont restés sur un match nul et, quinze jours après au match retour, ils ont perdu en Hollande. Mais bon, on avait quand même passé une superbe année avec ces matchs.

    J’avais un cousin qui faisait partie de l’encadrement du GFCA, un des clubs de football de la ville d’Ajaccio, le dimanche, je montais au stade de Mezzavia, au-dessus d’Ajaccio, pour l’aider à poinçonner les billets des spectateurs qui venaient voir le match, il fallait récupérer les billets entiers sans les déchirer pour les revendre deux fois au guichet, le club n’était pas riche, ça faisait un petit plus au black.

    J’avais bien sûr une copine plus régulière, Évelyne, que j’avais connue juste après avoir eu mon permis de conduire, et parce qu’elle était l’amie de la copine de mon pote. Je suis sorti avec elle pendant l’été 1978. On ne se voyait qu’un peu dans la journée. À l’époque, les filles à Ajaccio ne sortaient pas trop le soir, c’était bien plus strict que maintenant. Les soirées où je pouvais la voir c’est quand elle s’échappait de chez ses parents pour aller dormir chez des copines.

    J’ai fait un mois de prison en septembre 1978, j’avais tout juste 18 ans, j’avais volé quatre pneus sur une voiture de touristes hollandais. Ce n’était pas grand chose, mais j’avais eu droit à une garde à vue très musclée dans une gendarmerie, manque de bol pour moi, j’étais tombé sur de vrais brutes. A l’époque les gendarmes tabassaient copieusement les gardés à vue, ça a été le cas, je n’en suis pas revenu de prendre tant de coups pour un si petit vol. La plupart des gendarmes de l’époque étaient encore des vieux pieds-noirs rapatriés d’Algérie, qui devaient se croire encore dans la casbah à torturer à la gégène les Arabes du FLN algérien. J’étais tellement marqué au bout de quarante-huit heures qu’ils m’ont présenté au juge et qu’il m’a écroué. Plus pour avoir le temps de laisser s’effacer les marques, que pour ce vol.

    Je reste persuadé que cette garde à vue plus que musclée a été l’élément déclencheur qui a fait que j’ai mené cette vie-là par la suite. J’avais une haine terrible contre eux pour les coups reçus. Sur le moment, si j’avais pu, je les aurais tous tués sans hésitation. Ce jour-là, ils m’ont rendu service au final. J’ai eu moins d’hésitation quand l’occasion m’a été donnée plus tard d’en fracasser quelques-uns. Par la suite, je leur ai fait payer au centuple ce qu’ils m’avaient fait ce jour-là.

    Aujourd’hui, en garde à vue, c’est sandwichs, cafés, jus de fruits et avocat présent ou caméra vidéo, pour bien s’assurer qu’ils ne vont pas te toucher. Avant, c’était coups de pied, de poing, coups de tête même, et à poil pour t’humilier, et j’en passe.

    En plus, lors de cette détention, j’ai rencontré trois jeunes Corses d’Ajaccio, arrêtés une nuit et écroués pour des affrontements avec la police, lors d’une manifestation nationaliste qui avait dégénéré. J’avais parlé toute une nuit avec l’un d’eux qui avait atterri dans ma cellule, et il m’avait expliqué tout un tas de choses sur le nationalisme et ses luttes, ça m’avait bien conforté dans mes idées et c’est comme ça que j’ai voulu les rejoindre dans le mouvement.

    On s’est retrouvés tous dehors à Ajaccio, quelques jours après notre sortie de prison, on fréquentait tous le même petit bar, La Concorde, en bas du cours Napoléon. C’était le temps de l’UPC[2], un des seuls mouvements autonomistes publics. Pour beaucoup de jeunes, c’était UPC le jour, et FLNC la nuit.

    La nuit, je me rappelle, on allait afficher et faire des bombages FLNC à la peinture, partout sur les murs et les routes aux alentours d’Ajaccio, en soutien aux détenus politiques du FLNC de la Cour de sûreté de l’État. On partait à une douzaine, voire à plus dans des 4X4. Ça finissait à coups de poing avec les gendarmes et les policiers qui voulaient nous contrôler pour ce qu’on écrivait. Enfin, c’est nous qui leur en mettions. Une nuit, sur la route de Porticcio, des gendarmes un peu trop virulents à notre goût avaient voulu nous contrôler suite à nos bombages de peinture, ils n’ont pas compris ce qui leur arrivait, ils se sont pris une branlée. Ils se sont enfuis sans demander leur reste.

    Je me souviens d’une inscription à la peinture que j’ai faite sur la route de la plaine de Cuttoli sur un mur. Inscription qui est restée des années : « Français, n’oublie jamais que nos frères pourrissent dans tes prisons. »

    Je ne savais pas encore que j’allais les rejoindre plus tard, dans ces prisons. Plusieurs de mes copains de l’époque venaient d’être arrêtés pour quelques attentats, et transférés à Paris.

    Avec eux et d’autres, on avait écumé un peu les campings, on allait détrousser un peu les « pinzuti [3]» et les emmerder. On cherchait la merde gratuitement, plus pour se battre que pour les piller. Ça a duré quelques mois. Entre-temps, je suis parti à Nice une dizaine de jours faire la préparation militaire parachutiste car avec ce brevet, j’étais sûr d’être affecté dans un régiment de paras lorsque j’allais être appelé pour le service militaire, et c’est ce que je voulais à tout prix. Le service militaire étant obligatoire à l’époque, quitte à le faire, je voulais le faire seulement dans un régiment parachutiste.

    Mon départ à l’armée m’a sans doute évité une arrestation, bien que je n’étais pas présent sur les quelques petits attentats que mes amis avaient commis.

    PARA… ET BRAQUEUR

    J’allais partir à l’armée sans avoir eu le temps de faire grand-chose pour le FLNC. Je me suis retrouvé au 6ème RPIMA de Mont-de-Marsan. Un régiment très actif où le sport était une priorité, cela me plaisait, et je m’y donnais à fond. Jouer à la guerre dans les forêts des Landes, le tir à toutes les armes, cela pouvait me servir un jour, c’est ce que je me disais. Ce n’est pas tous les jours qu’on a l’occasion de tirer au lance-roquette, à la mitrailleuse ou au fusil d’assaut.

    J’ai gardé de cette époque-là une condition physique que je n’ai jamais vraiment totalement perdue. Tous les matins, pratiquement 12 ou 15 km de footing, ça laisse des traces, sans compter les milliers de pompes, de tractions à la barre ou de montées de corde.

    J’ai quelques fois eu le dos en sang avec ce sac à dos militaire pourri avec ses armatures métalliques qui nous cisaillaient les épaules, lors des marches forcées dans les forêts et sur les chemins des Landes. La marche ça ne me plaisait pas. Pourtant ils nous en ont fait manger des kilomètres, rien que la marche des fourragères, à la fin de nos deux mois de classe, faisait plus de 150 km.

    Par contre, j’ai toujours trouvé le moyen d’esquiver les défilés et parades militaires, je faisais semblant de ne pas savoir marcher au pas, du coup, j’étais exempté car je faussais le rythme de tout le peloton. Vu mes idées nationalistes, saluer le drapeau français, je l’évitais, et défiler au son des marches militaires, ça ne me plaisait pas du tout.

    Parfois, c’était rude et très physique, mais j’en garde un bon souvenir. C’est lors de cette période militaire que j’ai commis mes premières vraies actions de banditisme, sans même avoir l’impression que ça en était. En solitaire, sans même en parler à personne. Peut-être à l’époque, juste pour me tester, voir si j’en étais capable.

    En Corse, on n’a jamais manqué d’armes et s’en procurer une était facile, j’en avais toujours eu une en réserve depuis mes 16 ans.

    Après ma première permission, j’étais revenu de Corse avec ma voiture et une arme de poing, un automatique HerstallGP35 en 9 mm Parabellum. On faisait souvent des manœuvres dans la région autour de notre caserne et des balades le week-end et moi, j’observais avec une petite idée en tête tout ce qui se passait, j’avais remarqué dans les villages alentour que les postes étaient assez rustiques. Pas du tout comme celles d’aujourd’hui, elles ressemblaient plus à des épiceries qu’à des bureaux de poste. J’étais rentré acheter des timbres et téléphoner dans deux ou trois établissements différents, voir comment c’était à l’intérieur. C’était toutes plus ou moins les mêmes.

    C’est ainsi que je me suis lancé dans le premier hold-up de ma vie. En solitaire, dans une petite poste de village. Trop facile, une porte en bois, un guichet bas, un coffre-fort déjà ouvert. Et un seul employé.

    La méfiance n’était pas encore de mise dans ces années-là et la sécurité quasiment nulle. J’avais juste enfilé une cagoule, ça a été très vite, moins de deux minutes je crois, pour rafler cinq bâtons de l’époque (7500 euros). J’avais juste montré mon arme et l’employé m’avait rempli le sac plastique que je lui avais tendu, je pense qu’il a été plus surpris que choqué, c’était un homme, je me souviens de son air étonné, il n’a pas dit un mot ni même essayé de résister, je n’avais même pas de voiture volée, je m’étais servi de la mienne que j’avais juste garée deux ruelles plus loin, j’étais dans un bled à 6 ou 7 km de la caserne, en dix minutes j’étais de retour.

    La première chose que je me suis dit sitôt après, c’est que c’était vraiment trop facile de braquer. Ça remonte à loin maintenant, mais je ne me souviens pas avoir eu d’appréhension avant de « monter » sur ce braquo, ni même d’avoir ressenti de la peur avant, pendant ou après. Peut-être l’inconscience de la jeunesse.

    Mont-de-Marsan, en 1979, était une ville de garnison, il y avait une caserne de parachutistes, une caserne de gendarmes mobiles et une base d’aviateurs. Aujourd’hui, le régiment parachutiste dans lesquel j’ai servi a été dissous.

    Le soir venu, il y avait des centaines de militaires dans les rues de la ville, dans les bars et boîtes de nuit. J’avais mes habitudes dans une boîte qui s’appelait le Casino du Tuco. Il y avait pas mal de filles qui aimaient les militaires dans ce club.

    En plus, comme j’avais pas mal de monnaie vu le braquo, ça allait bien. Le salaire minimum de l’époque était l’équivalent de 310 euros mensuels et moi, en cinq minutes, je m’étais pris deux ans de salaire d’un coup.

    Ils n’ont jamais soupçonné que c’était un militaire qui avait commis ce braquage, en tout cas je n’en ai jamais entendu parler. Deux mois après, j’en ai refait un autre dans un autre village, encore huit bâtons (12 000 euros) et, hop, encore trois années de salaire, c’était facile, même mode opératoire. Là, c’était une femme, la postière, elle a eu un peu peur je crois, elle avait juste dit : « Ne me faites rien. »

    Avec le recul et l’expérience, je me dis que c’était vraiment du grand n’importe quoi, braquer avec sa propre voiture même en la laissant garée, cachée deux rues plus loin, n’importe qui aurait pu la signaler, quelle idiotie ! En plus, la voiture était repérable à des kilomètres avec ses bandes noires et sa tête de maure sur le capot. C’est un miracle que personne ne l’ait remarquée ces jours-là dans les bleds de ces deux postes.

    Heureusement que je n’ai pas payé ces coups-là. À 20 ans, j’aurais pu déjà me retrouver devant la cour d’assises des Landes et en plus, à l’époque, le vol à mains armées était passible dans certaines circonstances de la peine de mort[4]. Mitterrand n’était pas encore élu et elle n’était pas encore abolie. Personne de mon entourage n’a été au courant de ces deux braquages pendant des années. Je savais désormais que je n’aurais plus jamais de problème d’argent ma vie durant. En cas de besoin, je connaissais le moyen de m’en procurer.

    La vie militaire me convenait assez bien, j’adorais le sport qu’on y faisait, courir tous les matins ça me plaisait, j’avais une très bonne condition physique. J’arrivais à terminer des footings de 15 km en sprintant à fond sur le dernier kilomètre. J’avais choisi les paras pour sauter en parachute mais on marchait et on courait bien plus qu’on sautait. Et cela, je ne l’avais pas prévu, ça me gavait de marcher autant. Le plus pénible, c’était les marches de nuit, on arrivait épuisés à 2 h du matin et ils ne trouvaient rien de mieux que de nous faire nettoyer inlassablement nos armes jusqu’à 6 h du matin. Sans dormir, on repartait pour une journée de manœuvres. Soi-disant, un soldat est plus performant quand il ne dort pas, ses sens sont bien plus aiguisés. Parfois, ils nous réveillaient en pleine nuit pour nous faire démonter complètement nos chambres, tout descendre depuis le troisième étage et remonter la chambre dans la cour derrière le bâtiment, avec les armoires rangées et les lits faits au carré. Militairement parlant, je n’en voyais pas trop l’utilité. Les corvées de nettoyage de chambrée étaient bien pires, ils nous en collaient une avant chaque départ en permission, il fallait cirer le parquet en bois jusqu’à ce qu’il brille comme un miroir. Il ne devait pas rester la moindre poussière dans la chambre. Un sergent passait toutes les deux heures vérifier, s’il trouvait une poussière il disait : « Je repasse dans deux heures. »

    Et nous, on attendait sa décision et son bon vouloir pour partir en permission. Un jour, un de ces connards n’a rien trouvé de mieux à faire lors du deuxième contrôle, après avoir enfilé des gants blancs pour passer sa main dans tous les recoins possibles, que d’enfiler un coton-tige dans les trous d’une prise électrique. Bien sûr, il a ressorti un peu de noir, il est reparti en nous narguant et en disant: « À dans deux heures. »

    Je l’aurais tué.

    Sur toute la période de mon service militaire, on n’a pas fait plus d’une quinzaine de sauts, à mon grand regret. J’étais bien noté et bien classé, j’étais sorti des classes sixième sur 1200, ça m’avait permis de choisir mon affectation. Le deuxième temps chrono, sur un parcours du combattant, m’avait remonté au classement jusqu’à cette sixième place. J’avais décroché un galon de caporal en effectuant le stage PEG (peloton d’élève gradé) et je voulais faire le SQSO (stage de qualification sous-officier) pour devenir sergent. Je pensais même prolonger mon service de six mois pour partir au Liban. Deux mois, en tant que sergent appelé et quatre mois, en tant que sergent engagé, ça payait super bien.

    Mais une petite magouille que j’avais faite m’avait coûté cher, et avait compromis mon départ. J’avais récupéré des balles de 9 mm Parabellum lors d’un stage de tir à Caylus, c’était du matériel de guerre, c’était interdit. Ces balles avaient été retrouvées dans ma voiture lors d’un contrôle, lorsque j’avais franchi le poste de garde de la caserne, j’ai été dégradé immédiatement. Heureusement qu’ils n’avaient pas trouvé mon GP35, caché derrière la console du poste-radio.

    Je m’étais tapé des semaines d’arrêt de rigueur, dans des cellules glacées qui étaient des anciennes écuries datant du temps où ce régiment avait des chevaux.

    Partir au Liban sans le grade de sergent, je n’en avais plus la moindre envie. Du coup, comme j’avais mon permis de conduire, je me suis fait affecter comme chauffeur du capitaine de ma compagnie, une bonne planque. Le pauvre capitaine, je l’ai rendu fou les quelques mois où j’ai été à son service. La plupart du temps, mon boulot consistait à aller le chercher chez lui à 6 h pile du matin, mais je faisais chaque fois un détour pour m’arrêter acheter des pains au chocolat dans une boulangerie, ça le rendait dingue : j’arrivais toujours avec dix minutes de retard, et il sentait dans la voiture l’odeur des pains au chocolat chauds.

    J’avais quelques bons potes de chambrée avec qui je sortais dans les bars et les boîtes, des sorties mémorables. On s’est souvent battus comme des chiens, en ville ou dans les villages alentour, soit avec d’autres militaires, soit avec des Gitans de la région. C’était vraiment violent les castagnes, je me souviens d’une bagarre à la sortie d’un bal d’un village voisin de Mont-de-Marsan. Il y avait devant l’entrée une baraque à frites. On devait se battre à huit contre quinze. À un moment, on a jeté un mec par dessus le comptoir, il a atterri les deux mains en avant dans le bac de la friteuse avec l’huile en train de bouillir. Je me souviens encore de ses hurlements.

    Je ne suis jamais sorti un seul soir armé en ville. Même si je pensais maîtriser mes réactions, je ne sais pas si un soir où ça aurait dégénéré plus que d’habitude, je ne m’en serais pas servi. C’était mieux de sortir sans.

    Par un coup de piston venant d’Ajaccio, j’ai pu faire une demande de libération anticipée et quitté le 6ème RPIMA quelque temps avant ma date officielle de fin de service. Puisque je ne partais plus au Liban, je ne voyais plus de raison de rester plus longtemps.

    J’ai gardé une amitié avec un des gars de ma chambrée, je l’ai retrouvé par hasard quinze ans après, un jour, à Marseille. On s’était croisés dans les allées d’un cirque, on s’y promenait en famille. Cette amitié se poursuit encore trente-cinq ans après avec Jean-François, qui est devenu aujourd’hui coutelier en Corse dans son village de Moltifao. J’y suis passé le voir en 2008, il vit vraiment dans un coin perdu, au bout du monde. Pour arriver à sa bergerie qu’il a rénovée en maison, il y a bien 3 ou 4 km de piste de terre, mais l’endroit est magnifique.

    Retourner en Corse un jour et y vivre dans un cadre pareil, ça me plairait sûrement beaucoup.

    AJACCIO… LA NUIT

    Les derniers mois de mon service militaire, je m’étais marié, ma copine de l’époque, Évelyne, étant tombée enceinte. Mais je le savais dès le départ qu’elle et moi ça n’allait pas aller loin, c’était voué à l’échec. J’avais envie de tout autre chose que d’une vie de famille. Mais bon, à l’époque c’était un peu comme ça en Corse, la fille était enceinte, fallait réparer la faute. J’avais connu son frère avant de partir à l’armée, il était devenu un pote, je ne pouvais pas avoir mis sa sœur enceinte et m’esquiver, ça ne se faisait pas. Je l’aimais bien mais ça ne suffisait pas, le jour du mariage à Ajaccio, je me demandais déjà comment j’allais pouvoir me sortir de ce mariage.

    Sitôt libéré de mes obligations militaires, le 31 mars 1980, je suis rentré en Corse, je vivais au départ avec ma femme à la plaine de Cuttoli chez mes grands-parents, ça a duré moins de six mois et elle est repartie chez ses parents, avec ma fille Corinne qui était née entre-temps. Je n’étais pas du tout prêt à jouer un rôle de père. J’étais un vagabond, je ne pensais qu’à sortir, je rentrais toutes les nuits à 6 h du matin. J’ai même failli ne pas arriver à temps pour son accouchement. Je n’avais repris le travail chez Peugeot que trois mois et j’avais stoppé, je n’avais plus envie d’avoir les mains dans le cambouis.

    Le lendemain de mon retour de l’armée, je me suis acheté une Alfa Romeo neuve, de couleur jaune, elle me plaisait bien. Je l’avais de suite arrangée à ma manière, jantes larges en aluminium, peinture personnalisée, un arceau de sécurité et des harnais.

    Un cousin m’avait trouvé une place dans un bar et je sortais toutes les nuits. C’était insupportable pour ma femme, je faisais tout pour qu’elle se casse. Et elle a fini par partir. J’ai bossé treize mois dans ce bar puis j’ai arrêté.

    Le boulot de barman me convenait parfaitement, pas fatigant du tout, des nanas tout autour, et de la monnaie plus qu’il ne m’en fallait.

    J’avais pris un appartement pour quelques mois sur la route des îles Sanguinaires, après le cimetière d’Ajaccio, pour éviter de remonter toutes les nuits au village chez mes grands-parents. On y finissait souvent les soirées avec des amis et des filles. Comme c’était une location saisonnière, et qu’à partir de juin le loyer quadruplait, je l’ai laissée et je suis revenu chez mes grands-parents à la plaine de Cuttoli.

    Un jour, pour rendre service à un mec que je connaissais, un gars prénommé Laurent, je lui ai proposé de l’héberger. Il était en dispute avec sa famille et se retrouvait sans appartement. Profitant des trois mois passés chez moi, cette crapule m’avait dérobé quatre ou cinq chèques au milieu d’un carnet que j’avais laissé dans une armoire. Je m’en suis aperçu, il était déjà reparti de chez moi. Monsieur s’était refait une garde-robe sur mon compte, j’ai remonté les chèques un à un, magasins de fringues et de chaussures. Il m’a fallu deux ou trois mois pour le retrouver. Il ne pensait sans doute pas que j’allais mettre tant de hargne à le traquer, mais j’avais la rage de m’être fait avoir par cette canaille. J’ai mis un avis de recherche sur sa tête dans toute la région. J’ai obtenu l’info et, un soir, avec mon cousin Alex, on l’a trouvé dans un restaurant attablé avec une nana en train de faire le beau. On l’a littéralement kidnappé devant toute la salle du resto et on l’a emmené en voiture. Quelques kilomètres plus loin, sur une route de montagne, on lui a filé une bonne rouste et, pour finir, on l’a jeté à 11 h du soir dans un ravin, vingt mètres plus bas. On s’est assuré qu’il criait toujours du fin fond du ravin. Je lui ai dit : « T’as une semaine pour rembourser. »

    Il était récalcitrant, il lui a encore fallu une « mise au point » quinze jours plus tard et qu’on l’emmène tout ensanglanté chez sa famille pour obtenir le remboursement des chèques qu’il m’avait fauchés, mais bon, au final, j’ai tout récupéré et en plus, on s’était bien marrés.

    Un peu plus tard, avec mon cousin Alex, on a monté un petit business de ferraille et de pièces autos. On faisait le tour de la Corse avec un camion pourri qu’on avait acheté et rafistolé, sans permis et sans assurance, on ramassait les batteries, le cuivre, le plomb, l’alu carter, et même les vieux moteurs, on stockait tout, on volait même les rouleaux de fil de cuivre des lignes téléphoniques aériennes, que les ouvriers démontaient le long des routes, pour en installer des souterraines. On brûlait les rouleaux de fil pour faire fondre le caoutchouc et on récupérait le cuivre, on stockait tout et quand on arrivait à charger un semi-remorque plein, on le faisait partir pour Marseille sur un ferry, et on revendait le tout à un ferrailleur. On encaissait quatre ou cinq bâtons chacun, et on passait deux ou trois jours à faire la bringue dans les caboulots, les petits rades vers l’Opéra à Marseille.

    On a bien rigolé, Alex et moi, à l’époque. Nos virées à travers la Corse étaient mémorables, on a débarqué dans des endroits pas possibles pour récupérer des tonnes de batteries de voiture. Personne n’était jamais passé avant nous pour le faire, on avait sur notre camion une balance à plateau qui volait la moitié de ce qu’on pesait, à peine le mec à qui on achetait le cuivre ou les batteries avait contrôlé la balance en se pesant dessus qu’on lui collait un aimant sous le plateau et elle ne pesait plus que la moitié. Alex était un embrouilleur de première.

    Une fois, un Gitan qui possédait une casse de voitures nous a refilé un moteur cassé alors qu’on cherchait un moteur de Peugeot 504 pour un client. On est alors retourné le voir pour se faire rembourser, il voulait pas. La nuit même, on est repassé, on lui a jeté six ou sept cocktails Molotov dans ses caravanes et son entrepôt, plus une bonne dizaine de coups de fusil dans ses fenêtres. On était un peu fous, on aurait pu en tuer deux ou trois comme ça, et pour finir, on a collé une grenade dans la cabine de son semi-remorque tout neuf. Le châssis a vrillé.

    J’ai fait une garde à vue pour ça, j’avais laissé une empreinte sur une des bouteilles d’essence qui, malheureusement, ne s’est pas cassée à l’impact. Il n’y a pas eu de suites graves. Juste un procès sans conséquences quelque temps après.

    Le passage au tribunal a été des plus cocasses, le greffier lisait l’acte d’accusation quand, d’un coup, le président a sursauté en entendant le nom du plaignant, il a interrompu tout le monde et m’a dit : « Le plaignant c’est la société Ferométal ? Ce ne serait pas le Gitan Roba ? »

    Moi : « Oui, c’est lui. »

    Le président : « Il vous a volé ? Escroqué ? »

    Moi : « Oui, tout a fait. »

    Et là, il n’a pas laissé, ni le procureur requérir, ni mon avocat plaider, il a parlé à l’oreille de ses assesseurs puis s’est retourné vers moi et m’a dit : « Huit mois de prison avec sursis, allez vous-en, je ne veux plus vous voir. »

    J’ai bien sûr envoyé mon avocat voir ce qui s’était passé pour que j’obtienne cette clémence-là. Et là, j’ai appris que quelques années en arrière, ce Gitan avait eu la mauvaise idée de revendre une commode ancienne volée à la femme de ce président. Du coup, j’ai eu droit à une grande indulgence de sa part, le jour où je suis passé.

    Un jour, on avait dépanné des Gitans sur le bord de la route, deux familles complètes avec caravanes et toute leur smala de gamins, ils venaient de se disputer avec un autre groupe de Gitans et avaient été obligés de quitter leur campement. On leur a proposé de s’installer sur un terrain qu’on avait à disposition et où on stockait des tonnes de moteurs, et on les a embauchés pour déferrer tout l’aluminium qui y était entreposé, comme ça on récupérait les carters et les culasses nettoyés de toute leur ferraille.

    Ils en ont eu pour des mois, ça les aidait bien financièrement et nous, on se retrouvait avec des tonnes d’aluminium propre, prêtes à être vendues au meilleur prix car plus un seul boulon au milieu. Tout était bon pour faire de la monnaie.

    Souvent, avec Alex et ses frères José et Félix, on descendait la nuit à la rivière braconner, ou chasser les bécasses avec la lampe frontale, ou bien tout simplement faire les cons, faucher un peu tout ce qui pouvait l’être.

    Dans le bar où je travaillais, il n’y avait que des natios, une partie dans le mouvement clandestin : le Front… Et puis par affinité, petit à petit, on te faisait des sous-entendus et des propositions : tu savais à quoi t’en tenir.En Corse, beaucoup de choses se savent, donc j’ai enquillé avec eux dans une petite structure au départ pendant deux ans. Une structure qui était sur Ajaccio. On était quatre et on avait un responsable de l’équipe, tout était cloisonné. On ne connaissait que le responsable qui lui, transmettait à l’instance supérieure. Pendant quelques années, je n’ai plus commis de braquages, je me consacrais uniquement à mes activités nationalistes au sein du FLNC. On faisait des dizaines d’attentats sur Ajaccio, on visait des portes d’appartements, des commerces, des voitures, tout ce qui pouvait appartenir à des continentaux ou bien à des administrations françaises, des banques, les centres d’impôts, leurs voitures. Bon, ce n’était pas des gros attentats, du moins pour ce qui nous concernait, mon équipe et moi, juste des vitrines, des appartements ou des voitures, mais ça avait quand même un impact certain. Ce qui est étrange, c’est que je n’arrive même pas à me souvenir de la toute première charge explosive que j’ai posée, tellement il y en a eu, pourtant c’est important le premier attentat de sa vie. Et bien non, aucun souvenir.

    Le responsable nous fournissait le matos : explosifs, détonateurs, bon, c’était artisanal à l’époque. Un peu d’explosif, un peu de mèche lente. Au bout de la mèche, on mettait la charge explosive qu’il fallait percer, et on sertissait un détonateur sur un morceau de mèche et on l’enfonçait dedans. La mèche lente en vérité, elle est rapide : elle se consume en trente secondes ! Donc pour retarder les effets de la mèche lente, on mettait au bout, du côté de l’allumage, un retardateur, un Tampax. Oui, un Tampax une fois allumé, il ne s’éteint plus. Donc on se servait de ça, c’était artisanal. Un Tampax court, c’était quinze minutes, un Tampax long c’était trente minutes, suivant le vent qu’il y avait dessus, suivant l’air qui soufflait. Évidemment, des fois, on a frôlé la catastrophe…

    Peu après, j’ai rompu avec cette petite équipe, j’avais eu un coup de chaud : une perquisition, je venais juste de récupérer les explosifs et le lendemain, perquise ! J’avais eu le temps de les sortir le soir avant parce que j’ai été prévenu donc, du coup, j’ai levé le pied pendant un moment.

    Dix-huit mois après, j’ai remis le couvert, mais dans une autre équipe du Front, dans un autre secteur, qui me convenait mieux parce qu’il était un peu plus actif. La région Ajaccio, elle était divisée en secteurs et moi j’étais sur le secteur S, secteur Sagone. Il me plaisait bien, parce que c’était un secteur où tu faisais plutôt des grosses actions, fini les vitrines, les voitures. On faisait plutôt des villas, des lotissements, des camps de vacances… C’était le secteur Sagone, Cargèse, Porto. Sur Ajaccio, il y avait secteurGravona, secteur Prunio, secteur des Volants qui s’agitaient un peu où ils voulaient.

    À l’époque, les instituteurs et les professeurs corses avaient le plus grand mal à se faire affecter sur l’île, ils étaient mutés à Paris, à Marseille, n’importe où mais pas en Corse. Alors que les enseignants qui venaient du continent arrivaient à la pelle. On réclamait la « corsisation » des emplois et on faisait sauter les voitures ou les logements des enseignants continentaux. C’était la grande époque des nuits bleues sur toute la Corse où l’on se coordonnait entre plusieurs secteurs pour commettre nos attentats pile à la même heure de la nuit. Ça limitait les risques de tomber dans les barrages qui se mettaient en place sur toute l’île, sitôt les premières explosions entendues.

    Et au matin, ça donnait entre quatre-vingts et cent attentats sur toute la Corse. Ce n’était pas vraiment, pour la plupart, des gros dégâts, mais psychologiquement, ça marquait les esprits des personnes visées, on était satisfait quand le lendemain, on les voyait quitter la Corse précipitamment. C’est normal quand tu te faisais sauter ta voiture, ta maison !

    Une année, je crois en 1982, un article avait annoncé qu’il y avait eu sept cents attentats revendiqués par le Front et commis sur l’année, on s’était rendu compte qu’avec notre petit groupe de cinq ou six, rien qu’à nous, on en avait fait soixante-dix, donc 10 % des attentats de l’année. On visait un peu toutes les institutions, les banques par exemple. Tout ce qui représentait l’État en vérité, l’État français. Et puis les villas de touristes qui faisaient construire des résidences secondaires dans des emplacements qui nous plaisaient pas, des lieux que nous voulions préserver, donc on faisait sauter. J’étais assez idéaliste et je croyais au bien-fondé et à la réussite de notre lutte à l’époque. Par ailleurs, on menait une vie de jeunes tout à fait normale, sauf que la nuit, en plus, on posait des charges explosives.

    [1][1] Les événements d’Aléria désignent l’occupation par des militants de l’Action régionaliste corse d’une cave viticole tenue par un rapatrié d’Algérie les 21 et 22 août 1975 à Aléria, en Corse. Face à la réponse musclée du gouvernement, elle-même à l’origine de violentes émeutes en Corse, notamment à Bastia, ces événements sont considérés comme l’acte fondateur du nationalisme corse moderne. NDE

    [2] L’Union du peuple corse - en corse : Unione di u Populu Corsu - était un parti politique fondé par Max Simeoni le 14 juillet 1977, qui se réclamait du nationalisme corse, dans sa branche autonomiste. Elle prenait la suite de l’Associu di i Patriotti Corsi, fondée en 1976 pour préparer le procès du drame d’Aléria.

    [3] Pinzutu : pointu, les Français du continent; le terme est un peu péjoratif. L’origine de ce mot viendrait du tricorne (chapeau pointu à trois pointes) que portaient les soldats français de Louis XV lorsqu’ils ont occupé la Corse, en 1768.

    [4] En cas de vol aggravé par le port d’une arme apparente ou cachée (article 381 du code pénal).